L’agriculture bio peut-elle nourrir le monde ?
De nombreuses études se sont penchées sur la question. Mais de quoi parle-t-on au juste ? De nourrir le monde en quantité, c’est-à-dire d’apporter le volume total d’aliments dont chacun a besoin chaque jour ? Ou bien en qualité, c’est-à-dire d’apporter les nutriments et les vitamines nécessaires à l’ensemble des habitants de la planète ? La question peut aussi être abordée de manière environnementale : l’agriculture bio est-elle capable de nourrir le monde tout en préservant la planète ? La question n’est donc pas simple. D’autant plus que l’agriculture biologique et « l’agriculture conventionnelle regroupent » chacune en leur sein une grande diversité de pratiques.
Concernant l’agriculture bio, deux chercheurs de l’université de Whashington, John Reganold et Jonathan Wachter, ont compilé 70 études globales permettant de comparer les agricultures bio et conventionnel. En termes de quantité, les chercheurs montrent que les rendements de l’agriculture biologique restent en moyenne inférieurs de l’ordre de 8 à 33% à ceux de l’agriculture conventionnelle. Avec de grosses disparités selon les régions et les plantes étudiées.
En termes de qualité, la majorité des études montre une meilleure teneur en vitamines C, antioxydants et oméga 3 dans les produits bios.
Une question à étudier de manière globale
Les deux chercheurs concluent que l’agriculture biologique pourrait donc être en capacité de nourrir 9 à 10 milliards d’individus Cela se fera au prix d’une augmentation mondiale des surfaces agricoles, du fait de rendements plus faibles qu’en conventionnel. Cette augmentation des surfaces est loin d’être une évidence dans un contexte de changement climatique, à moins de sacrifier des zones naturelles. Néanmoins, les progrès attendus dans la sélection variétale ou l’optimisation des techniques de production laisse entrevoir une baisse significative de l’écart de rendements entre bio et conventionnel. Par ailleurs, nombre de spécialistes estiment que la généralisation d’un régime alimentaire moins carné et plus végétal permettrait largement de compenser la plus faible productivité du bio. Une alimentation plus végétale est en effet capable de nourrir plus de monde avec moins de surface selon l’Organisation Mondiale de la Santé. Enfin, la lutte contre le gaspillage alimentaire permettrait également d’importantes économies. L’INRA estime ainsi dans son rapport Agrimonde de 2013 que l’humanité produit déjà plus de calories que nécessaire, mais réparties de manière très inégalitaire au niveau mondial. Le bio est donc en capacité de nourrir le monde de manière durable, à condition d’étudier la question de manière globale !